Les métamorphoses d’une sorcière : Proust et l’électricité - Université de Lille Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2009

Les métamorphoses d’une sorcière : Proust et l’électricité

Résumé

Le proustisme, pourrait-on dire, c'est La Recherche plus l'électricité. De cette énergie nouvelle, Proust s'empare comme d'une chance. Il découvre en elle la possibilité de faire se rejoindre son esthétique et l'esprit du siècle. C'est pourquoi l'électricité apparaît comme une sorcière, une puissance active de déconstruction. Elle défait le réel, déjoue les catégories anciennes qui en organisaient la perception. Elle détruit plans et perspectives ; elle produit des effets de sidération. Son pouvoir n'est jamais aussi grand qu'à Paris, quand la ville est plongée dans la guerre et l'obscurité. Les projecteurs électriques de la défense anti-aérienne déréalisent l'espace – et le temps ; sur la scène urbaine, marquée par la guerre, envahie par l'actualité politique et historique, ils font advenir la lumière du pur fantasme. L'électricité transforme la ville en théâtre, en spectacle, en fête. L'espace commun, celui de la cité, est évidé ; les " projections " de l'imaginaire s'approprient Paris, remodèlent la ville pour en faire le support ou l'écran cosmique des hantises du sujet. C'est pourquoi le parcours « électrique » que voudrait emprunter cette étude culmine dans une apocalypse, un festival baroque. L'impression saisissante de réalité – d'une réalité foisonnante, excessive, d'une surréalité – suscite le sentiment inverse d'une irréalité, selon un double processus de dissolution des repères consacrés et de recomposition de nouvelles instances, non encore pourvues d'un sens ou d'un statut bien définis. C'est l'irruption par excellence du moderne, du nouveau, qui fascine et inquiète, qui dessine un présent à la fois irréfutable et insaisissable. Mais comment le roman peut-il en arriver là ? Cette ultime manifestation de l'électricité reprend et intensifie toutes les représentations romanesques déployées précédemment, au fil du roman. On étudiera donc d'abord les rapports entre électricité et historicité, car l'apparition de l'électricité constitue un événement frontière, opérant une césure entre passé et présent ; puis, dans une perspective herméneutique, on verra que la lumière, bien visible, de l'électricité, se charge pour ceux qui la regardent, d'un sens et d'une profondeur invisibles. L'électricité n'est plus seulement une date ; elle devient un signe. Signe de quoi ? L'exégèse proustienne tend presque toujours à débusquer sous les choses la trace d'un désir, d'un affect. Le dernier temps de la réflexion sera consacré à l'électricité comme spectacle, comme énergie visuelle, apte à créer des agencements de plus en plus délirants – quoique cohérents dans leur délire.
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Dates et versions

hal-01677010 , version 1 (07-01-2018)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01677010 , version 1

Citer

Stéphane Chaudier. Les métamorphoses d’une sorcière : Proust et l’électricité. Etudes réunies par A. Montandon à partir d’un séminaire au Wissenchaftskolleg, Berlin, 13-15 juin 2007. Promenades nocturnes, L'Harmattan, p. 137-153., 2009. ⟨hal-01677010⟩
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