La question du référendum
Résumé
Referendums are increasing in most areas of the world, at both national and subnational levels. Meanwhile, citizens’ demand for direct democracy has never been stronger. This book is both a comparative study and a work on France, which has a very specific history of the process. It opens with a chapter on definitions (what is a referendum, how it differs and resembles other voting procedures, what forms it takes and which variables are relevant to construct a typology) followed by a chapter comparing the provisions and practice of referendums around the world, leading to different country profiles and highlighting what definitely appears as a French exceptionalism among democracies.
It continues with a historical account of the device in its three founding countries (USA, France and Switzerland), showing reciprocal influences, and pursues with an in-depth analysis of the French case since the revolution including Napoleonic episodes, its eclipse under the Third and Fourth Republic, and its return in force with de Gaulle as an instrument of the Executive - forging a regime close to Weberian « plebiscitary democracy ».
However, the French experience took a different path in 2005 with the referendum on the European Constitutional Treaty, which was largely suffered by the President of the Republic, being an example of a "politically obligatory referendum" – a referendum formally originated in the Government but in practice imposed by parties, grassroot pressure or "appropriateness", examples of which are multiplying in Europe. Chapters 5 and 6 analyse this request for bottom-up referendums in France, how it relates to the flaws of the Fifth Republic and how parties have responded to it.
The thesis of the book is that the introduction of the popular initiative can constitute a response to the interrelated crisis of confidence and performance of the French political system. A major means of achieving this is through its « Swiss » effect, of strengthening consultation upstream of policies. Far from being the strictly majority system pointed out by its detractors, the referendum can thus foster a more consensual democracy.
But the referendum remains a highly controversial process. The last part of the book turns to classic and new critiques addressed to it. Chapter 7 shows its fragile status in democratic theory. Paradoxically, the participatory current shows scarce empathy for the device, and it arouses little interest on the part of democratic innovation theories which developed from the 1990s, starting with that of deliberative democracy, which is frankly hostile. Its almost exclusive defense by populists today further adds to discredit.
The criticisms of the referendum, examined in chapters 8 and 9, are grouped into two main questions. That of its capacity to reflect the popular will, both as the will of the majority and the real preferences of the citizens. Alleged inherent defects of the device, such as binary choice or proxy voting are discussed ; And that of the political effects of referendums, both in terms of policies (« good government », impact on minorities, individual rights, etc.) and politics (conflict resolution, government efficiency, responsibility of those in power, etc.). The book shows that many of the faults attributed to the referendum seem exaggerated or are also found in representative democracy. They can also be corrected by appropriate methods. The conclusion articulates concrete proposals for reforming the referendum in France.
Les référendums se multiplient dans la plupart des régions du monde, tant au niveau national qu'infranational. Parallèlement, la demande citoyenne de démocratie directe n’a jamais été aussi forte. Ce livre est à la fois une étude comparative et un ouvrage sur la France, pays qui a une histoire très particulière du référendum. Il s'ouvre sur un chapitre de définitions (qu'est-ce qu'un référendum? Il s'ouvre sur un quoi le procédé diffère-t-il et se rapproche-t-il d'autres procédures de vote? Quelles formes prend-il et quelles variables sont pertinentes pour construire une typologie des référendums?) suivi d'un chapitre comparant les dispositions et la pratique des référendums dans le monde, conduisant à des profils de pays différents et mettant en évidence ce qui apparaît définitivement comme une exception française parmi les démocraties.
Il se poursuit par un récit historique du dispositif dans ses trois pays fondateurs (Etats-Unis, France et Suisse), montrant les influences réciproques, avant de procéder à une analyse approfondie du cas français depuis la révolution incluant les épisodes napoléoniens, l'éclipse du procédé sous la Troisième et la Quatrième République, et son retour en force avec de Gaulle comme instrument de l'exécutif – contribuant à forger un régime proche de la « démocratie plébiscitaire » webérienne.
Pour autant, l'expérience française a pris un chemin différent en 2005 avec le référendum sur le traité constitutionnel européen, qui a été largement subi par le président de la République, constituant un exemple de « référendum politiquement obligatoire » – un référendum formellement initié par l'exécutif mais imposé dans la pratique par les partis, la pression populaire ou encore sa nature «appropriée», dont les exemples se multiplient en Europe. Les chapitres 5 et 6 analysent cette demande de référendum "d'en bas" en France, son lien avec les failles de la Ve République et la manière dont les partis y ont répondu.
La thèse du livre est que l'introduction de l'initiative populaire peut constituer une réponse à la crise interdépendante de confiance et de performance du système politique français, en particulier grâce à son effet « à la suisse », de renforcement de la concertation en amont des politiques. Loin d'être le système strictement majoritaire pointé par ses détracteurs, le référendum peut ainsi favoriser une démocratie plus consensuelle.
Mais le référendum reste un processus très controversé. La dernière partie de l'ouvrage se tourne vers les critiques classiques et nouvelles qui lui sont adressées. Le chapitre 7 montre son statut fragile dans la théorie démocratique. Paradoxalement, le courant participatif fait preuve de peu d'empathie pour le dispositif, et il suscite peu d'intérêt de la part des théories innovantes qui se sont développées à partir des années 1990, à commencer par celle de la démocratie délibérative, franchement hostile. Aujourd’hui, sa défense presque exclusive du procédé par les populistes ajoute encore à son discrédit.
Les critiques du référendum, examinées dans les chapitres 8 et 9, sont regroupées en deux questions principales. Celle de sa capacité à refléter la volonté populaire, tant celle de la majorité que les préférences réelles des citoyens. Les prétendus défauts inhérents au dispositif, tels que le choix binaire ou le vote par procuration sont discutés ; et celui des effets politiques des référendums, tant en termes de politiques publiques (« bon gouvernement », impact sur les minorités, droits individuels, etc.) que sur le système politique (résolution des conflits, efficacité des institutions, responsabilité du pouvoir, etc.). L'ouvrage montre que nombre des défauts attribués au référendum semblent exagérés ou se retrouvent également dans la démocratie représentative. Ils peuvent également être corrigés par des méthodes appropriées. La conclusion articule des propositions concrètes pour réformer le référendum en France.