Corps en partage
Résumé
Henry Maldiney (1991 : 101) reports the example of a patient in whom the own and the foreign are not separated but caught in an incessant tug of war: "the same patient may not feel that a part of his body is being touched (so much he is hardly his), but to be upset because a chair is removed in front of him, so much the things around him are his flesh." The idea of the shared body refers in the study of psychoses to two closely related processes. linked, which can be quite disturbing: either the body is deconstructed and fragmented, or it becomes intertwined with the other bodies present in its environment. The mirror should in principle allow toddlers to anticipate, in an imaginary way, their unity by perceiving their own image. This self-image, which is therefore not innate, is then gradually reinforced through different stages of awareness. When a person cannot identify their own body schema, the fantasy of the fragmented body can arise. In this case, the subject experiences difficulty demarcating the boundaries between his body and what surrounds him.
Our object here will obviously not be to claim to take part in these debates but rather to grasp their eminently evocative character in order to understand how, in their own way, the artists Diana Quinby, Eric Monbel and Emmanuelle Gailliez, operate games of passage of the body perceived intrinsically, specific to itself and determined within its rational limits, to the existing body, contextualized or amended by the circumstances of the visible. Based on a few selected and non-exhaustive works, we will propose to describe and analyze these singular divisions of the body where fragmentation, splitting, dislocation, are plastically accompanied by phenomena of conversions, co-corporeality, of contiguity.
Henry Maldiney (1991 : 101) rapporte l’exemple d’un patient chez qui le propre et l’étranger ne sont pas séparés mais pris dans un incessant bras de fer : « le même malade peut ne pas sentir qu’on touche une partie de son corps (tellement il est peu sien), mais être bouleversé parce qu’on enlève une chaise devant lui, tant les choses autour de lui sont sa chair.» L'idée du corps en partage se réfère dans l'étude des psychoses à deux processus étroitement liés, qui peuvent être assez troublants : soit le corps est déconstruit et fragmenté, soit il s'entremêle avec les autres corps présents dans son environnement. Le miroir, doit en principe permettre aux tout-petits d'anticiper, de manière imaginaire, leur unité en percevant leur propre image. Cette image de soi, qui n'est donc pas innée, est ensuite renforcée progressivement à travers différents stades de prise de conscience. Lorsqu'une personne ne parvient pas à identifier son propre schéma corporel, le fantasme du corps morcelé, peut survenir. Dans ce cas, le sujet éprouve des difficultés à délimiter les frontières entre son corps et ce qui l'entoure.
Notre objet ici ne sera évidemment pas de prétendre prendre part à ces débats mais plutôt d’en saisir le caractère éminemment évocateur afin de comprendre combien, à leur manière, les artistes Diana Quinby, Eric Monbel et Emmanuelle Gailliez, opèrent des jeux de passage du corps perçu intrinsèquement, propre à lui-même et déterminé dans ses limites rationnelles, au corps existant, contextualisé ou amendé par les circonstances du visible. À partir de quelques œuvres choisies et non-exhaustives, nous nous proposerons de décrire et d’analyser ces singuliers partages du corps où le morcellement, le dédoublement, la dislocation, s’accompagnent plastiquement de phénomènes de conversions, de co-corporéité, de contiguïté.