Émotions et sentiments sont au coeur de la vie des individus et au centre de la plupart de leurs activités culturelles et de loisirs – répertoire inépuisable pour les livres, films, séries ou chansons qu’ils lisent, écoutent et regardent, ou d’effets produits par la lecture, l’écoute et le visionnage. Ils sont au centre des engouements et des passions culturelles, des plus ordinaires1 aux plus professionnelles. Pourtant, peu de chercheurs ou chercheuses (francophones) se sont questionné·es concrètement sur les liens réciproques entre émotions et culture. Si les émotions ont été évoquées dans l’analyse de la formation des goûts et des dégoûts culturels, par exemple chez Pierre Bourdieu, elles n’y sont considérées que comme des signes de l’incorporation réussie (ou pas) d’une norme socialement située et non pour elles-mêmes et, de ce fait, les pratiques émotionnelles liées à l’esthétique, à l’art et à la culture ont été peu investiguées. De même, rares sont les travaux qui se sont penchés sur les effets des pratiques et répertoires culturels sur la définition, la gestion et la mise en mots ou en scène des émotions, si ce n’est par la bande, quand, par exemple, les sciences de l’information s’intéressent aux effets (« limités » ou « puissants ») des médias.