From défrichement to déchiffrement: the linguistic cultivation of rural France in the nineteenth century and the aftermath of traductologie
Résumé
At the end of the nineteenth century, a policy of linguistic défrichement (‘clearing’) was imposed on the French provinces. Dialect elements that were encroaching on local French, especially rural and territorial vocabulary, were systematically eradicated in the national schools by a pedagogy of linguistic standardisation. This policy was the superstructural mechanism of an infrastructural project to transform and expand land use, suggests this article: défrichement in the literal sense. It was therefore related to the bourgeois reification of the word culture in French (and then, via Matthew Arnold, in English), which implied the subordination of rural activities of cultivation to urban (scientific) culture. Meanwhile, a rapid increase in the intertranslation of European scientific discourses stimulated the innovation of a number of new sciences (including Comparative Linguistics and Sociology), which in turn led to a new scientific interest in translation. This nascent translation science was directly implicated in the policy of linguistic défrichement via experiments with patois-French translation exercises designed to improve the didactics of standardisation. The fact that modern French translation scholars have largely overlooked this thorny issue in their subject’s development – including Antoine Berman, who had translated the standard history of the Modernization of Rural France – is called into question.
Vers la fin du XIXe siècle, une politique de défrichement linguistique fut imposée aux provinces françaises. Les éléments patoisants qui envahissaient le français des enfants paysans, surtout les lexiques rural et territorial, furent systématiquement éradiqués par une pédagogie normative au sein du système scolaire. Cet article pose que cette politique fut le mécanisme superstructurel d’un projet infrastructurel d’aménagement du territoire : le défrichement au sens propre. Elle s’associe donc à la réification bourgeoise du mot culture en français (puis, grâce à Matthew Arnold, en anglais), qui impliquait la subordination des métiers de la culture (champêtre) des paysans à la culture (scientifique) des citadins. En même temps, une progression rapide de l’intertraduction des discours scientifiques européens entraînait la création de plusieurs nouvelles sciences (comme la linguistique comparée et la sociologie), qui faisaient naître un regain d’intérêt scientifique pour la traduction. Cette traductologie naissante s’impliquait directement dans la politique du défrichement linguistique sous la forme d’exercices de version patois-français conçus pour rendre plus efficace la didactique normative. Cet article remet enfin en question l’absence de cette problématique épineuse chez les traductologues français – dont Antoine Berman, qui avait traduit l’histoire de référence de La fin des terroirs – dans le développement de leur champ de recherche.
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