Ordres et désordres de l'évasion carcérale
Résumé
Negotiated order, revolt and escape are closely linked: escapes, like revolts, justify for the institution the need to restore the image of the total institution as a place of submission and order. Far from being isolated incidents that cause chaos in a usually ordered environment, escape and revolt are an extension of the negotiated order of everyday prison life, and a revealing event of the institution's core. The reflection will be carried out in five succinct and distinct points: first, we will explore the cultural and seductive power of escape. Then we will ask what is both sociological evidence and a reality too little explored as such by sociologists: prison is and will remain, before a disciplinary institution, an anti-escape mechanism. Third, we will criticize the dominant institutional and academic knowledge of the modes of observation and classification of escape. We will then return more concretely to the analytical continuum that associates escape, revolts and institutional transformations. Finally, we will try to objectify the specific stakes of mass evasion in relation to strict individual evasion.
L’ordre négocié, la révolte et l’évasion sont intimement liés : les évasions, comme les révoltes, justifient pour l’institution la nécessité de rétablir l’image de l’institution totale comme lieu de soumission et d’ordre. Loin de constituer des incidents isolés venant semer le chaos dans un milieu habituellement ordonné, l’évasion et la révolte constituent le prolongement de l’ordre négocié du quotidien carcéral, et comme événement révélateur du noyau dur de l’institution. La réflexion s’effectuera en cinq points succincts et distincts : d’abord nous explorerons le pouvoir séducteur, culturel et intime, de l’évasion. Ensuite nous poserons ce qui relève à la fois d’une évidence sociologique et d’une réalité trop peu explorée en tant que telle par les sociologues : la prison est et restera, avant une institution disciplinaire, un dispositif anti-évasion. Dans un troisième temps, nous opérerons une critique des savoirs institutionnels et académiques dominants des modes d’observation et de classification de l’évasion. Nous reviendrons ensuite plus concrètement sur le continuum analytique qui associe évasion, révoltes et transformations de l’institution. Enfin, nous tenterons d’objectiver les enjeux spécifiques de l’évasion de masse par rapport à la stricte évasion individuelle.