Introduction. Sexualités minoritaires
Résumé
L’organisation sociale des sexualités minoritaires est travaillée depuis maintenant plusieurs décennies par deux processus conjoints et complémentaires. Politiques de l’égalité d’abord : contre l’hétéronormativité conjugale et reproductive, l’époque contemporaine est le théâtre d’une multiplication des revendications à la déstigmatisation, la dépathologisation, la décriminalisation, et la normalisation sociale de pratiques sexuelles diverses. Politiques de l’identité ensuite : ces revendications s’accompagnent d’une transformation des différentes communautés sexuelles elles-mêmes, que ce soit sous la forme d’innovations relatives (la communauté « asexuelle » – ou « ace » –, la communauté « polyamoureuse », etc.), ou de reconfigurations conceptuelles et identitaires.
Par exemple, l’appellation traditionnelle « SM », pour « sadomasochisme », va, à partir des années 1990, progressivement être supplantée par un acronyme plus large, le « BDSM » (« B/D » pour « Bondage et Discipline », « D/s » pour « Domination et Soumission », « S/M » pour sadomasochisme), afin d’essayer d’unifier sous un même label tout un ensemble de pratiques érotiques (bondage, fessée, etc.) pratiquées au sein de différentes communautés érotiques minoritaires. Il s’agit de chercher à mettre en avant ce qui unit ces communautés et ces pratiques plutôt que ce qui les distingue, à savoir une forme d’échange contractuel de pouvoir utilisant la douleur, la contrainte, l’humiliation ou la mise en scène de divers fantasmes dans un but érogène, sexuel, ou amoureux…